Le lion et le lièvre construisaient ensemble une case neuve. Le lion avait fait le plus gros travail. Le lièvre se chargea des finitions. Enfin, peu importe, l'édifice était parfaitement réussi et c'était le principal.
Vint le jour de l'emménagement.
Le lièvre arriva le premier, nanti d'un canari plein d'eau, d'une calebasse neuve, d'une peau séchée et d'une corne. Il prit possession des lieux et s'y installa en maître, prenant soin de fermer soigneusement les deux portes et les fenêtres.
Quand le lion arriva quelques instants après, il fut surpris de trouver les issues closes. Il frappa.
Le lièvre répondit :
« Trop tard, la maison est occupée, et définitivement par quelqu'un qui est plus fort que toi. N'insiste pas, c'est peine perdue ! »
« Quelqu'un qui est plus fort que moi ? interrogea le Roi des animaux ; gratte-toi donc que je me rende compte ».
Et le lièvre gratta la peau sèche !
« Tousse » fit le lion.
Et le lièvre toussa dans la calebasse ce qui décupla la portée de sa voix.
« Siffle maintenant ! ».
Et le lièvre siffla dans la corne.
« Urine cria le lion », manifestement à bout d'arguments.
Alors le lièvre vida sur le sol le contenu du canari plein d'eau.
«Tu es vraiment le plus fort » déclara le lion non sans amertume avant de quitter les lieux.
Le jour même, le lièvre emménagea avec sa femme et ses trente-deux enfants.
Louis Vincent Thomas